Pendant une heure Baptiste Beaulieu, médecin et écrivain évoque son enfance, l'amour des mots et son métier de soignant. La "littérature nous traite en adulte", tout y est : la souffrance, la mort, la perte et la beauté.
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-source/la-source-du-dimanche-23-avril-2023-9319553
- Baptiste Beaulieu Médecin
"De
quelles blessures naissent les livres et le besoin d’en écrire, d’en
lire, d’en parler ? De quelles grandes plaies ouvertes au cœur se
nourrit la passion des mots, du langage, de tout ce qu’on ne peut pas
dire mais qu’on peut tout de même raconter ? Parfois la réalité,
l’intensité de la réalité surpasse le langage, elle l’écrase, le met de
côté, il faut vivre, être là, prendre des décisions, c’est une question
de vie ou de mort, c’est une question de respiration, de cœur, de
tremblement. L’écriture vient après, pour mettre de l’ordre, pour
inscrire une trace ou pour comprendre, elle est puissante quand elle a
le temps et l’espace. L’écriture dit ce qu’on ne dit pas, montre ce
qu’on ne voit pas, ou si peu, elle révèle et rassemble.
Baptiste
Beaulieu est un homme qui a le cœur dans la voix : il soigne. Médecin à
Toulouse, passé par les urgences d’où il tire toutes les histoires
racontées sur un blog puis dans un livre, "Les 1001 vies des urgences",
adapté au théâtre. Il a publié depuis plusieurs romans et un album
jeunesse, "Les gens sont beaux", paru aux Editions Les Arènes. Je l’ai
rejoint, le temps d’une soirée, chez lui, à Toulouse, et pendant une
heure, nous avons discuté de ce que cela signifie, soigner, par tous les
moyens." Cécile COULON
« 25 patients par jour, c’est 25 histoires de vie, je me suis mis à écrire parce que c’était insupportable que ces histoires ne soient pas partagées, quel gâchis ! » Baptiste Beaulieu
Alors Voilà, Baptiste Beaulieu (Extrait)
« J’ouvre la porte du box 3, quitte le box 3, referme la porte du box 3, attrape la poignée du box 6, pousse, entre, referme la porte du box 6. Les Urgences, JOUR 1 42 parfois, ont des allures de vaudeville. Il manque le placard et l’amant caché dedans. Certains jours, l’opérette cède la place à la tragédie antique. L’hôpital est un théâtre : on y chante ce que nous sommes, ce qui nous détermine ou nous émeut. En bien, en mal, ce lieu est un athanor alchimique où se distille lentement l’humanité malade de la vie. Je m’y promène, je chante ce que je vois : un creuset où des gens souffrent, rient, se transforment. D’autres, penchés sur tout ça, qui se débattent tant bien que mal. Il y a l’amour, la colère, le rire, la peur, l’espérance. Des humains sont au milieu. Avec des histoires à raconter : la Vie."
Le mot de la fin
Cécile Coulon : Où va votre écriture, a-t-elle une destination ?
Baptiste Beaulieu : "Plus j’écris, plus je sens que je me dirige vers la colère, j’imagine qu’elle va peut-être diminuer, elle tient aussi à ce que je vois dans mon cabinet. On travaille avec des foyers qui accueillent des victimes de violence conjugale et c’est extrêmement difficile de ne pas avoir envie de prendre sa revanche sur le monde, d’accueillir leur souffrance et de leur dire, je vous vengerai avec un livre. Je pense à une patiente défigurée par son mari, et la main sur la poignée de la porte elle m’a dit, docteur, je voudrais juste vous montrer une photo de moi avant, Docteur j’étais belle. C’est pour elle que je veux écrire."
Les Sources de Baptiste Beaulieu :
Texte source : L'oeuvre de Fernando Pessoa, plus particulièrement Le gardeur du troupeau
Musique source : Ecrire de Charles AZNAVOUR
Lectures
Les gens sont Beaux, Baptiste Beaulieu, Editions les Arènes
Alors voilà : les 1001 vies des Urgences, Baptiste Beaulieu, Editions Fayard
Alors vous ne serez plus jamais triste, Baptiste Beaulieu, Editions Fayard
Croc-Blanc, Jack London
La joie et le reste (poème) Baptiste Beaulieu, Editions L'iconopop
Le gardeur du troupeau, Fernando Pessoa
Le banquier anarchiste, Fernando Pessoa
Programmation musicale
- POMME Un million
- GAZ COOMBES Don't say it's over
- CHARLES AZNAVOUR Écrire
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