mercredi 8 novembre 2023

Quelle est la sagesse des contes de fées ?

 

Parfois tendres, parfois féroces, les contes de fées mettent souvent la réalité en scène. 

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/grand-bien-vous-fasse/grand-bien-vous-fasse-du-mercredi-08-novembre-2023-3983850 



Une émission consacrée à la sagesse des contes, à destination des enfants et des adultes…

Zoom ce matin sur quelques personnages souvent issu de ces contes. De Blanche-Neige à la Princesse aux petits pois de Boucle d’Or à la Reine des Neiges, que nous disent encore ces récites en 2023 ?

De quelle façon ces contes et légendes constituent-ils des boussoles pour naviguer par gros temps dans nos sociétés plus liquides et incertaines que jamais ?

Et vous quels sont les contes et légendes qui vous ont marqué et quels sont ceux que vous transmettez à vos enfants et petits-enfants ?

Nos invités Fabrice Midal et Bernadette Bricout attendent vos questions et vos témoignages au 01 45 24 7000 et sur l'application France Inter.

Avec :

  • Fabrice Midal est philosophe, auteur, enseignant et créateur du podcast Dialogues. Livre : Les princesses ont toujours raison. La sagesse des contes et légendes pour déjouer les pièges d’aujourd’hui - Flammarion 2023
  • Bernadette Bricout est professeur de littérature orale à l’Université Paris Diderot. Son enseignement et ses recherches, à la croisée des disciplines et des cultures, portent sur les mythes et les contes de tradition orale. Livre : La clé des contes - Seuil 2005
À écouter : L'origine des contes
 

Ali : Alors comme ça, Gwénaëlle, aujourd’hui, vous avez peur de nous décevoir…

Oh là là oui.. je la vois là, toute la jeune génération de parents féministes qui m’attend au tournant. Ah ah ! J’espère bien qu’elle va se les farcir un peu ces greluches de Blanche-Neige et de Cendrillon, toutes plus bêtes les unes que les autres à attendre leur blond et stupide Prince Charmant… Qu’elle va nous le démonter fissa ce roi pervers prêt à épouser sa fille (#Peau d’âne)… Alors, oui, ok, c’est bon, on sait tous aujourd’hui que les contes de fées, écrits pour certains à la toute fin du 17e siècle ne sont pas un modèle de modernité en ce qui concerne les rapports hommes-femmes, qu’ils contribuent à véhiculer un certain nombre de stéréotypes sur une certaine hétérosexualité en particulier. Mais je dois avouer que pour ma part, je n’ai pas attendu metoo pour comprendre, même enfant, que :

1 / nous, les femmes n’avions pas besoin d’hommes et encore moins de princes pour nous sauver

2 / Nous n’étions pas forcément prêtes à tout quitter (tel la petite sirène) par amour… ni ne souhaitions forcément être mariées et avoir beaucoup d’enfants

3 / N’étions pas forcément douces, passives et passionnées de ménage en sifflotant

4 / Ne détenions pas toutes le pouvoir de converser au petit matin avec les animaux de la forêt.

Ali : Passée cette petite mise au point, vous être donc plutôt une fan des contes de fée…

Mais oui ! Complètement ! Car pour moi, le fameux « Il était une fois… » restera toujours ce moment magique où, enfant, mon papa ou ma maman, ma sœur et moi quittions soudain la vraie vie pour nous laisser littéralement glisser dans un monde fantastique. Un monde fait de princes et de princesses, certes, mais un monde surtout rempli de loups, de méchantes marâtres, de rois possessifs, de terribles sorcières, de géants affamés… dont ensemble, soir après soir, bien au chaud sous notre couette, nous allions pouvoir triompher. Mourir de peur mais triompher 1 fois, 2 fois, 10 fois, 100 fois s’il le fallait ! Charles Perrault, en 1697, écrivait ceci en parlant des enfants à qui on lit des contes : « On les voit dans la tristesse et dans l’abattement, tant que le héros ou l’héroïne de conte sont dans le malheur, et s’écrier de joie quand le temps de leur bonheur arrive ; de même qu’après avoir souffert impatiemment la prospérité du méchant ou de la méchante, ils sont ravis de les voir enfin punis comme il le méritent » Le conte de fée, c’est avant tout cela : le fait de traverser des épreuves pour de faux et en toute sécurité, de vivre en empathie avec un héros des émotions fortes afin d’accéder au final à un monde plus juste. Le conte de fée, c’est la soif d’un monde où, après les épreuves, vient la justice et le droit au bonheur. Et cet espoir, il est universel. C’est ce qui fait que si, comme Hansel et Gretel (mon conte préféré) vous avez subi une enfance terrible, eh bien oui, vous pouvez toujours fonder votre espérance sur le fait que le choses rentreront un jour dans l’ordre.

Ali : Et puis, les contes, c’est aussi un langage savoureux, une entrée dans la littérature.

« Tire la chevillette, la bobinette cherra… » (Ali, vous me conjuguerez le verbe choir à tous les temps tous les modes !), « c’est pour mieux te manger mon enfant ! »… Si les contes traditionnels ne sont pas hyper metoo, ils font partis des trésors de littérature qui traversent les générations et tissent une culture commune. Le magique « Il était une fois… » nous fait entrer dans un autre monde, régi par d’autres lois. Alors, comme le conseillait la grande conteuse Miss Sara Cone Bryant dès 1905 à ses apprentis conteurs : prenez votre histoire au sérieux, traitez-la avec respect car si elle vaut la peine d’être dite, elle mérite d’être bien dite. Prenez votre temps pour la lire. Laissez derrière les soucis de la journée et du lendemain… Car ce que nos enfants désirent encore plus que l’histoire elle-même, c’est nous entendre la lui lire.


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